Chanteur connu et reconnu, à 72 ans, Michel Etcheverry a sorti son 28ealbum pour Noël*. Il a aussi été pilotari. Il a dû arrêter sa carrière, en 1982, à cause d’une blessure au majeur de la main droite, touché par le staphylocoque doré. Il revient sur ses meilleurs souvenirs et sa vision de la pelote d’aujourd’hui.
Vous avez été champion de pelote à main nue. Quels souvenirs gardez-vous de votre carrière ?
Michel Etcheverry : J’en ai de très bons et de moins bons, bien entendu, parce que la pelote est faite de victoires et de défaites. Je ne citeraipas mes défaites, il faudrait une autre page. Ma grande année c’était en 1975, avec Robert Dufourcq, on a été champions de France et champions du Pays basque dans toutes les disciplines : mur à gauche, fronton place libre et trinquet. C’est un record jamais égalé. Mon souvenir le plus marquant est sans doute en septembre 1970. J’avais 22 ans. J’étais sélectionné pour les championnats du monde en mur à gauche à Saint-Sébastien. Le jour de l’inauguration où toutes les équipes défilaient sur le fronton, Joseba Elosegi s’était jeté en feu de la tribune car il y avait le général Franco et sa femme qui présidaient la cérémonie. Il avait crié “Gora Euskadi azkatuta” (Vive le Pays basque libéré). C’est un souvenir qui m’a marqué.
J’ai également été sélectionné pour les championnats du monde de 1974, à Montevideo. J’étais sélectionné avec Robert Dufourcq. On avait perdu la finale 25-21 contre Retegui III et Del Poso. C’était le jour de la foire d’Hélette, mon village natal. On était à 10 000 km. J’ai dit à Robert Dufourcq “qu’est-ce que je fais ici, à Montevideo, alors que c’est la foire d’Hélette ?”. Cela avait fait rire tout le monde. Suite à cela, le sélectionneur espagnol, Paco Arriaran, nous avait convoqués pour faire une proeba (une preuve), contre les Espagnols, au fronton Beotibar de Tolosa. On avait gagné largement, et dans la semaine, il nous avait proposé un contrat pour aller jouer en Espagne. Nous étions les premiers à avoir la possibilité de jouer là-bas. On a refusé cette proposition.
J’ai également eu l’honneur de jouer contre Joseph Laduche et Jean-Baptiste Harambillet, mes idoles, pour leur dernière partie, avec Dominique Aguerre, à Mendionde.
Pour la pelote, j’ai aussi fait plusieurs tournées en Californie. La dernière en date, l’été dernier, avec Jean-Marc Charritton, Marc Mittoux (photographe), Peio et Bixente Larralde, Bixintxo Bilbao, Jon Saint-Paul et Maxime Etcheverry. Ils ont joué à San Francisco, Bakersfield et Chino. C’était pour les récompenser de leur parcours. Il y a quarante ans, il y avait beaucoup de monde là-bas pour la pelote mais aujourd’hui, malheureusement, c’est fini.
Comment jugez-vous l’évolution de la main nue depuis votre époque ?
M.E : Comme dans tous les sports, il y a eu beaucoup d’évolution. Les joueurs s’entraînent plus, il y a plus de diététique, ils sont beaucoup plus préparés. C’est d’ailleurs très bien qu’il y ait le centre d’entraînement, au Berria, pour les jeunes. C’est une révolution qu’il n’y avait pas à mon époque. Personnellement, je suis fan de la pelote en trinquet. Pour moi, c’est le plus beau jeu qui existe. J’aimerais qu’il y ait dix Larralde, Ducassou, Guichandut, Bilbao, Ospital, etc. Il manque des talents. Pour moi, c’est le rugby, hélas, qui a fait du mal à la pelote. La main nue est très dure et ce n’est pas encore assez médiatisé.
Que pensez-vous du niveau actuel des joueurs ?
M.E : Il y a des joueurs exceptionnels. Peio Larralde et Baptiste Ducassou sont largement au-dessus du lot. Peio Guichandut aussi est très doué, comme Mathieu Ospital. Bixintxo Bilbao a des qualités extraordinaires aussi mais on ne le voit plus en ce moment. Celui qui me plaît beaucoup, c’est Peio Guichandut, on dirait un oiseau qui danse. Il ne faut pas non plus oublier Bixente Larralde et Luis Sanchez, deux jeunes en devenir.
On vous voit régulièrement dans les trinquets, notamment aux parties du Berria, co-organisées par Esku Pilota. Que pensez-vous du travail de l’association ?
M.E : C’est un travail formidable. Heureusement qu’Esku Pilota a pris cela en main. Il y a un moment où la pelote n’allait pas bien du tout. Les trinquets étaient désertés, il y a eu un manque pendant quelques années. C’est Esku Pilota qui a reboosté le système. Je leur dis bravo ! Heureusement aussi qu’il y a eu la réouverture du trinquet Berria, et du trinquet Moderne.
* Album Gure Lurra. “Pilota eta kantua horra ene bizi modua, zer suerte guziz zilarra nola ez eskertu gure lurra”.